missjador

I've got the power

Lundi 7 avril 2008 à 20:45

 






Grisaille et désespoir. La ville n'est composée que de ça. La tristesse sillonne les rues comme un serpent à la recherche de sa destinée.

Cafard. Tous les ans, c'est pareil. Je n'ai aucune envie de venir mais mes pas m'y conduisent comme s'ils avaient une volonté propre. Je ne peux rien faire contre cette force qui m'amène ici. Parce que cette force a fait parti de ma vie. Silhouette dont le visage m'échappe et qui pourtant fait parti intégrante de mon existence. Un souvenir qui s'effiloche avec le temps mais que je ne peux rayer de ma mémoire.

Tous l
es ans c'est pareil, retour dans le passé. Je hais les cimetières. Ils m'étouffent. Tout est gris, soumis aux intempéries. Des veuves, des mères, des enfants viennent dépoussiérer les plaques de marbres qui les séparent de leurs défunts. Enlever des feuilles mortes, remplacer des fleurs en plastique, replacer les vases et les plaques funèbres. En les voyant j'hésite toujours entre éclater de rire ou esquisser un sourire indulgent. Mais non. Quelqu'un m'attend. Je ne me presse pas, il ne va pas partir. Mon humour noir ne me fait pas rire.


Ca y
est, j'y suis. La grande plaque de granit noir me choque toujours autant mais le pire, c'est de voir le nom et la photo de celui qui fut mon meilleur ami. Une photo où il sourit, en plus. Son visage me revient, son rire résonne à mes oreilles. C'est désagréable parce qu'il faut que je vienne ici pour m'en souvenir.

Derrière
moi, quelqu'un arrive. Je reconnais cette façon de marcher. C'est elle. Lili. Tous les ans, on se retrouve au cimetière. On ne se parle jamais. Même pas pour échanger des politesses. Depuis qu'il nous a quittées, nous nous sommes éloignées l'une de
l'autre.
Notre trio, je le
compare souvent à un tabouret. Sur trois pieds, il était stable mais sur deux il s'est cassé la gueule. A croire que c'était grâce à lui
qu'on filait droit.

Qu'est-ce que t'en penses Lili ?

Rien. T'en p
enses rien. Parce que je ne t'ai pas posé la question, tu ne réfléchiras pas. T'as toujours été comme ça.

Dans
notre sympathique trio, il était le bouclier, tu étais l'épée et moi j'étais la tête ou les yeux. On se complétait mais maintenant qu'il n'est plus là, c'est chacune pour soi. J'ai appris par un de nos amis commun que tu avais fait de la taule, Lili. S'il avait été vivant, il t'aurait protégée et tu serais restée libre. Remarques, si j'avais été avec toi, tu n'aurais pas fait de connerie. Mais avec des si, on pourrait ramener tous les morts à la vie
.
Lili se casse. Bizarre
cette façon de marcher. Elle tape des pieds comme si elle voulait s'enfoncer sous terre à chaque pas. Enfin. Ma démarche n'est peut-être pas meilleure. Je réfléchis tellement que j'en viens à me torturer l'esprit pour des broutilles qui n'en valent pas la peine. J'ai toujours été comme ça. Bien que parfois ça sert énormément. La dernière fois, j'ai bloqué sur la forme d'une serrure. Piégée. Pareil pour une poignée dont la couleur ne me revenait pas. Enduite de poi
son tactile.

La vie des gamines n'est pas simple.

Qu'est-ce que t'e
n penses, toi, sous ta pierre tombale ? Rien. Ca fait des semaines que tu ne penses plus. Des semaines que tu m
'a laissée tomber enfoiré !
Tien
s, j'ai des fleurs pour toi. Des immortelles. C'est pas de circonstance mais il faut bien qu'elles tiennent jusqu'à l'année prochai
ne.

Je me suis
habillée chic pour venir te voir. Jean tailleur, comme d'habitude. Seulement je me sens toujours miteuse face cette foutue dalle de granit noir. J'ai honte de ma tenue et mes fleurs
.

Je n'aime pas les
cimetières et leur faculté à m'ôter de la tête toute pensée un tant soit peu intelligente alors je vais te laisse
r.

Retour au po
rtail. Je me suis toujours demandée pourquoi les cimetières avaient une porte et des murs. Ils ne vont pas s'en aller les mor
ts.
Ca me dépasse. On paie des gens pour construire des prisons pour les morts et pendant ce temps, des voleuses professionnelles se baladent en lib
erté.
Bah ! Je ne vais pa
s me plaindre. Tu va m'en vouloir, je ne sais même pas quand tu es parti finitivement. Je crois que je tente d'oublier
. J'étais sur le point de réussir, de ne plus me souvenir de cette date mais une photo : ça claque comme un coup de fouet.
Pardonne-moi de ce retard...

Au revoir, cher ami. On se revoit l'année prochaine, même jour, même heure, même tenue, mêmes fleurs.

 

Par mArchEr-pAs-drOIt le Mardi 6 mai 2008 à 13:46
dommage qu'on ne puisse pas lire... le gris sur le fond blanc :s
sinn ton blog est sympa!
 

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