C'est comme une sensation de déjà-vu. Une intuition, un pressentiment. Un tremblement qui emprunte des chemins du corps déjà parcourus. Un frôlement, une émotion. La pupille se dilate, le souffle s'accélère, les chairs frissonnent. Ce sentiment éprouvé mille fois résonne dans les os, dans la tête. Battements de plus en plus rapide, le cœur s'emballe, se serre. Les entrailles se nouent, se tordent. Les pas accélèrent la cadence, le souffle devient râle. Courir, courir pour fuir. Fuir pour survivre. La pluie se met à tomber. Sol glissant. Boue. Chute. Douleur. Craquement et ecchymoses. La tête tourne et devient lourde. Une dernière prière pour une dernière minute de vie. Existence : Game Over. Le vent souffle, soulevant une mèche. Avec lui, les dernières forces. Vigueur et énergie reviennent, la course reprend. Trébuche, se cache, crapahute. Avancer comme on peut. Dans le noir et trempé. Cette terreur toujours ancrée au fond de soi. Une panique canalisée pour l'instant. Des gestes maladroits mais sûrs, ils savent. Il faut partir. Ne jamais revenir pour ne jamais ressentir une nouvelle fois ce sentiment d'horreur. Le corps tremblant obéit sans regarder aux blessures, au sang. Il évolue dans l'ombre mais le but est précis. Mais les jeux sont faits. Malgré ce regain de force, il n'y a rien à faire. Rien à fuir. Car sans espoir. Le mal est en soi, au sein même du corps. Épuisement, abandon. Être statique, immobile. Dans l'attente. Le sang se répandant, le cœur s'accélérant et envoyant dans tout le corps ce poison glacé et meurtrier. Des souvenirs passent, des sons et des images défilent. Une dernière goutte de vie s'échappe de la veine et s'éclate en mille morceaux écarlates sur le goudron. Adieu monde. Adieu ciel. Adieu Terre. La peur est trop grande.
missjador
I've got the power
Lundi 13 octobre 2008 à 20:33
Amor
A mort
Je ne peux plus pleurer, je n'ai plus de larmes en stock. Faut me refournir. Je laisse couler doucement ce liquide. Chaud et brûlant de douleur sur ma peau. Un goutte à goutte comme mes larmes. Un liquide de remplacement rouge et délivrant. Libérant de toute cette presison, ce vacarme, ces nausées. Je crois que j'ai besoin qu'on m'entoure, qu'on me serre dans ses bras en me disant "Voilà, c'est fini". Qu'on s'occupe enfin de moi. J'aime les autres mais je ne peux pas tout leur offrir. J'aimerais chasser leurs problèmes, je ne supporte pas de les voir tristes, de les voir pleurer. Mais je ne peux pas tout faire même si je me sacrifie pour eux. Alors je laisse couler ce liquide, doucement, goutte à goutte...
Tu es mon amour
Tuer mon amour
Dimanche 18 mai 2008 à 11:06
Photo : vue de l'hôtel à Rome par moi ^^
Comme un gribouillis
Un brouillon de soi même, vivre différemment, dans la joie et la peine, mais vivre seulement
Comme un griboullis
Dans un souffle de vent, sans pouvoir tout comprendre, mais toujours en avançant, quitte à s'y méprendre
Comme un gribouillis
Une tâche indélibile, sur le papier de notre existence, trop risible, pour avoir consistance.
Mais le gribouillis, signe d'ennui, veut s'évaporer, s'en aller. Mais le gribouillis, pauvre de lui, est retenu, par ce que j'ai vu, vécu, entendu. Mais le gribouillis, maintenant subit, les traces de l'expérience, les méandres de la méfiance. Mais le gribouillis est ancré, ne peut s'échapper, de cette prison, de cette vision.
De cette vision sans douceur.
Lundi 7 avril 2008 à 20:45
Cafard. Tous les ans, c'est pareil. Je n'ai aucune envie de venir mais mes pas m'y conduisent comme s'ils avaient une volonté propre. Je ne peux rien faire contre cette force qui m'amène ici. Parce que cette force a fait parti de ma vie. Silhouette dont le visage m'échappe et qui pourtant fait parti intégrante de mon existence. Un souvenir qui s'effiloche avec le temps mais que je ne peux rayer de ma mémoire.
Tous les ans c'est pareil, retour dans le passé. Je hais les cimetières. Ils m'étouffent. Tout est gris, soumis aux intempéries. Des veuves, des mères, des enfants viennent dépoussiérer les plaques de marbres qui les séparent de leurs défunts. Enlever des feuilles mortes, remplacer des fleurs en plastique, replacer les vases et les plaques funèbres. En les voyant j'hésite toujours entre éclater de rire ou esquisser un sourire indulgent. Mais non. Quelqu'un m'attend. Je ne me presse pas, il ne va pas partir. Mon humour noir ne me fait pas rire.
Ca y est, j'y suis. La grande plaque de granit noir me choque toujours autant mais le pire, c'est de voir le nom et la photo de celui qui fut mon meilleur ami. Une photo où il sourit, en plus. Son visage me revient, son rire résonne à mes oreilles. C'est désagréable parce qu'il faut que je vienne ici pour m'en souvenir.
Derrière moi, quelqu'un arrive. Je reconnais cette façon de marcher. C'est elle. Lili. Tous les ans, on se retrouve au cimetière. On ne se parle jamais. Même pas pour échanger des politesses. Depuis qu'il nous a quittées, nous nous sommes éloignées l'une de l'autre.
Notre trio, je le compare souvent à un tabouret. Sur trois pieds, il était stable mais sur deux il s'est cassé la gueule. A croire que c'était grâce à lui qu'on filait droit.
Qu'est-ce que t'en penses Lili ?
Rien. T'en penses rien. Parce que je ne t'ai pas posé la question, tu ne réfléchiras pas. T'as toujours été comme ça.
Dans notre sympathique trio, il était le bouclier, tu étais l'épée et moi j'étais la tête ou les yeux. On se complétait mais maintenant qu'il n'est plus là, c'est chacune pour soi. J'ai appris par un de nos amis commun que tu avais fait de la taule, Lili. S'il avait été vivant, il t'aurait protégée et tu serais restée libre. Remarques, si j'avais été avec toi, tu n'aurais pas fait de connerie. Mais avec des si, on pourrait ramener tous les morts à la vie.
Lili se casse. Bizarre cette façon de marcher. Elle tape des pieds comme si elle voulait s'enfoncer sous terre à chaque pas. Enfin. Ma démarche n'est peut-être pas meilleure. Je réfléchis tellement que j'en viens à me torturer l'esprit pour des broutilles qui n'en valent pas la peine. J'ai toujours été comme ça. Bien que parfois ça sert énormément. La dernière fois, j'ai bloqué sur la forme d'une serrure. Piégée. Pareil pour une poignée dont la couleur ne me revenait pas. Enduite de poison tactile.
La vie des gamines n'est pas simple.
Qu'est-ce que t'en penses, toi, sous ta pierre tombale ? Rien. Ca fait des semaines que tu ne penses plus. Des semaines que tu m'a laissée tomber enfoiré !
Tiens, j'ai des fleurs pour toi. Des immortelles. C'est pas de circonstance mais il faut bien qu'elles tiennent jusqu'à l'année prochaine.
Je me suis habillée chic pour venir te voir. Jean tailleur, comme d'habitude. Seulement je me sens toujours miteuse face cette foutue dalle de granit noir. J'ai honte de ma tenue et mes fleurs.
Je n'aime pas les cimetières et leur faculté à m'ôter de la tête toute pensée un tant soit peu intelligente alors je vais te laisser.
Retour au portail. Je me suis toujours demandée pourquoi les cimetières avaient une porte et des murs. Ils ne vont pas s'en aller les morts.
Ca me dépasse. On paie des gens pour construire des prisons pour les morts et pendant ce temps, des voleuses professionnelles se baladent en liberté.
Bah ! Je ne vais pas me plaindre. Tu va m'en vouloir, je ne sais même pas quand tu es parti définitivement. Je crois que je tente d'oublier. J'étais sur le point de réussir, de ne plus me souvenir de cette date mais une photo : ça claque comme un coup de fouet.
Au revoir, cher ami. On se revoit l'année prochaine, même jour, même heure, même tenue, mêmes fleurs.